Trompe-l’oeil aux gravures
Artiste d’importance dans le nord de la France, non seulement comme portraitiste des grandes personnalités arrageoises, mais également comme premier conservateur du Musée des Beaux-Arts d’Arras, Dominique Doncre a rassemblé les premières œuvres qui constituent encore aujourd’hui le fleuron de la collection du Musée.
Dominique Doncre naît en 1743 à Zeggers-Cappel, dans le nord. Issu d’un milieu modeste, sa jeunesse et son apprentissage artistique ne sont pas connus. Par tradition, on lui attribue des études anversoises, mais aucun document ne l’atteste. Cette hypothèse provient certainement du goût affirmé de Doncre pour la peinture flamande et hollandaise.
Peintre d’histoire, de grands décors, Dominique Doncre s’exprime dans presque tous les genres picturaux. Son biographe, Constant Le Gentil (XIXe), recense près de 350 œuvres, parmi elles, seules quatre-vingts nous sont connues, et souvent d’attributions incertaines. Pour moitié il s’agit de portraits, exercice dont il fera l’essentiel de sa carrière ; et dans de rares cas, de trompe-l’œil. Malgré un nombre d’œuvres très restreint dans ce domaine, c’est bien par le trompe-l’œil que Doncre affirme toute sa virtuosité. L’histoire voudrait qu’il ait même enseigné les subtilités de ce genre au jeune Louis-Léopold Boilly (1761-1845), signalé à Arras entre 1775 et 1779.
Par ses dimensions exceptionnelles ; près de deux mètres de haut par un mètre cinquante de large ; son sujet : un ensemble de gravures d’après les grands maîtres des écoles du nord et leurs portraits ; et enfin sa datation : 1764, Doncre n’étant âgé que de vingt et un ans ; notre tableau s’impose comme l’un des premiers grand chef-d’œuvre du peintre.
Vibrant hommage rendu aux maîtres du nord qu’il affectionne tant, Doncre livre ici une œuvre unique et surprenante, où se côtoient Rubens, Van Dyck, Teniers, Seghers, Bloemaert, Snyders, Jordaens, ou encore Callot…Les chefs-d’œuvre qui composent notre tableau, sont facilement identifiables (cf. liste en bas de page). Ils sont au nombre de quinze, accompagnés du portrait de leurs auteurs, cependant une seizième figure s’est immiscée dans l’ensemble, et ce visage n’est autre que celui de Dominique Doncre. En intégrant son portrait au collège des plus grands peintres flamands, Doncre manifeste son attachement à cette école de peinture, non sans une pointe d’humour et d’orgueil…
Les œuvres représentées
Première rangée, en haut du tableau, en partant de la gauche :
- Jordaens (1593 – 1673), Scène allégorique, et son portrait partiel.
- Van Dyck (1599 – 1641), Vision d’un évêque, et son portrait
- Pierre-Paul Rubens (1575 -1640), descente de croix, et son portrait.
- Daniel Zeegers (1590-1661), Tulipes, et son portrait partiel.
Sous Daniel Zeegers, Hans Rottenhammer (1564-1625), La Samaritaine, portrait caché.
Rangée du milieu en partant de la gauche :
- Erasme Quellin le jeune (1607 – 1678), La décollation de Saint Jean-Baptiste, et son portrait.
- Abraham Van Diepenbeeck (1596-1675), La cène, et son portrait
- David Teniers (1610 – 1690), La tentation de Saint-Antoine, et son portrait.
Avant dernière rangée du bas, en partant de la gauche :
- Hendrick Bloemaert (1602-1672), Adam et Eve, et son portrait.
- Adriaen Brouwer (1605- 1638), Scène de genre, et son portrait caché dans l’angle
- Gerard Seghers (1591 – 1651), La trahison de St Pierre, et son portrait
Dernière rangée :
- Bonaventura Peeters (1614-1652), Marine, et son portrait.
- Pieter Van Avondt (1600-1652), Putti, chêvres et satyre, et son portrait.
- Jacques Callot (1592 – 1635), Le dernier souper, et son portrait.
Autoportrait de Dominique Doncre.
- Frans Snyders (1579 – 1657), La chasse au sanglier, et son portrait.